Enquête #3 Cap sur les villes moyennes

Face à la métropolisation, dominante depuis plusieurs décennies en France, certaines villes et territoires peinaient à réaffirmer leur place dans le cœur des Français. La tendance se renverse aujourd’hui, portée par une recherche d’un meilleur cadre de vie et boostée par la crise sanitaire. Et si ce n’était définitivement plus la taille qui comptait ?
Vers un nouvel équilibre du territoire français ?

Vers un nouvel équilibre du territoire français ?

Comptant entre 20 000 et 150 000 habitants1, les villes moyennes semblent être à nouveau dans le viseur de Français suite à la longue période de post-désindustrialisation et aux politiques publiques qui ont favorisé, à partir des années 1980, la concentration de l’activité économique dans de grandes agglomérations urbaines. Selon le sondage Kantar/Potloc pour la Fabrique de la Cité (décembre 2020), pour plus de 8 Français sur 10, les villes moyennes apparaissent comme des « villes où il y a tout » : aussi bien un cadre de vie plus agréable, pour les habitants des grandes villes, qu’une offre de services et d’emplois plus importante, pour ceux des zones rurales.

Jean Viard confirme « l’attraction actuelle pour les villes qui se situent à 1h / 1h30 en train des 10 métropoles du pays qui, rappelons-le, comptent 65 % du PIB et 45 % de la population. De la nature environnante, un jardin avec des arbres : voilà ce que recherchent aujourd’hui les 30 % de Français qui ne vivent pas déjà dans ce schéma-là », explique le sociologue et directeur de recherche CNRS au CEVIPOF (le Centre de recherches politiques de Sciences Po), qui cite l’exemple des « villes-cathédrales comme Reims » pour illustrer ces nouvelles aspirations. Outre leur prix au m2 attractif et leur promesse d’un cadre de vie plus serein (espace, nature, silence…), les Français assument parfaitement de s’identifier à leur territoire et sont à la recherche de modes de consommation plus locaux, éthiques et sains.


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1 Dans une définition mêlant emploi, population et statut administratif, l’INSEE définit comme ville moyenne « un pôle de moyenne ou grande aire urbaine comprenant plus de 5 000 emplois, dont la population est inférieure à 150 000 habitants et qui n’est pas une préfecture d’une ancienne région. 311 villes de France métropolitaine répondent à cette définition, selon l’Institut. 



« Toutes les études récentes démontrent que les Français cherchent à s’installer près de leurs proches et à faire leur vie à côté de chez eux, avec les écoles ou leur club de sport à proximité, par exemple. On est passé d’une société du parking et de la voiture à un modèle où les deux mots clefs sont local et livraison ».

Jean Viard, sociologue et directeur de recherche CNRS au CEVIPOF

Stéphane Pons, directeur général délégué de Pitch Immo, voit dans cette tendance un phénomène durable, « ne serait-ce parce que certaines métropoles ont décidé d’arrêter de construire. Conclusion : les prix n’y baissent pas et les habitants en mal d’espace s’en vont. C’est le cas, notamment, de nombreux Lyonnais ou Bordelais, qui optent respectivement pour des villes comme Dijon ou Libourne. Un nombre important de villes de la côte Atlantique ont également une cote en hausse ».

10

%

des transactions concernent actuellement des biens situés dans des zones moins denses qu’en agglomération. Dans les villes moyennes, les prix ont d’ailleurs progressé de 8,4 % en 2021 (contre 7 % sur le reste du territoire).

Source : FNAIM.


+ 55

%

de croissance démographique dans les villes moyennes ces 10 dernières années.

Source : Rapport « les villes moyennes, un pilier durable de l’aménagement du territoire », France Stratégie.


Les questions climatiques en toile de fond

Les questions climatiques en toile de fond

Le changement climatique pourrait bien aussi accélérer cette nouvelle donne territoriale. Dans son rapport « Les villes moyennes, un pilier durable de l’aménagement du territoire »2, France Stratégie démontre l’impact du réchauffement climatique sur l’organisation agricole actuelle. Traductions probables : des migrations domestiques et d’importantes évolutions - aussi bien pour les espaces ruraux qu’urbains - qui pourraient redistribuer, là encore, les cartes de l’attractivité résidentielle des villes. Pour Jean Viard, « on est en train de comprendre que le local est une des réponses au réchauffement climatique (…). Quoi qu’il en soit, chaque région a une identité liée à son propre passé, et les populations ont toutes une histoire elle aussi singulière. C’est sur cette relation entre les deux que les collectivités peuvent construire. Dans cette optique, les territoires qui font en sorte que les compétences se croisent en créant des tiers lieux vont, à mon avis, dans la bonne direction ». À noter également que 33 % des Français considèrent les villes moyennes mieux adaptées aux changements climatiques.3

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2 « Les villes moyennes, un pilier durable de l’aménagement du territoire ? » – France Stratégie Note n°107, janvier 2022.

3 L’étude IFOP pour l’Agence nationale de la cohésion du territoire, 2020.

Un rythme à suivre

Un rythme à suivre

Conséquences de ce regain d’attractivité de nombreux territoires : de nouveaux enjeux dans leurs formes diverses. Tout d’abord liés à la situation socio-économique locale, avec notamment une offre en logement ou foncier ne pouvant pas toujours suivre le rythme d’une demande grandissante. Dans certaines villes balnéaires, l’équation entre la hausse des prix de l’immobilier et la consommation d’espace élevée pose par exemple déjà la question d’un accès au logement pour tous, mais aussi de la préservation de l’environnement. L’emploi est également au cœur des questionnements, avec parfois une vraie dichotomie entre désir d’installation et postes à pourvoir, comme cela est particulièrement le cas dans des agglomérations ayant souffert de la désindustrialisation, qui-plus-est parfois peu dotées en emplois publics.

Les promoteurs (déjà) au rendez-vous

Quelles que soient leurs approches, les politiques locales vont nécessiter un accompagnement décisif pour accroître leur offre résidentielle, au premier rang desquels celui des acteurs de l’immobilier. Comment ? « En s’appuyant, tout d’abord, sur le maillage régional » répond Manuel Colleaux, directeur général adjoint du pôle logement d’Altarea. « C’est ce que nous avons fait avec nos différentes marques partout en France, tout en accroissant cette force de frappe dans certains territoires. C’est le cas avec une présence forte de Pitch Immo dans le Var, en Savoie-Léman, Auvergne, Bourgogne et Loire-Atlantique ou encore via l’implantation de nouveaux bureaux et antennes Cogedim à Angers, Caen, Clermont-Ferrand, Dijon, Metz, Mulhouse, Rennes, et Tours ».

« Partout, nos marques apportent un savoir-faire et des produits reconnus pour leur qualité. Nous imaginons des réponses diversifiées, en phase avec des usages et des attentes en pleine transformation ».

Manuel Colleaux, directeur général adjoint du pôle logement d’Altarea
Altarea développe son expertise locale

Altarea développe son expertise locale

Preuve qu’Altarea fait plus qu’avancer ses pions sur l’échiquier de la redynamisation des villes moyennes en France : la friche militaire des anciennes casernes de Beaumont-Chauveau, un quartier situé à l’ouest de Tours, deviendra, en 2025, Carré Rabelais. Ce projet mixte de grande ampleur (1 500 m2 de bureaux – dont environ 580 m2 dédiés à la Maison du Bois, des commerces et services de proximité, et 300 logements), dont les travaux débuteront durant le dernier trimestre 2022, s’avère inédit pour Cogedim et son partenaire Quatro Promotion sur le territoire tourangeau. Autre première pour Cogedim dans une ville en plein développement : le Jardin des Pépinières, à Rouen, un nouveau quartier mixte majoritairement résidentiel (600 logements dont quelques maisons de ville) né des cendres d’une friche urbaine de 500 logements désaffectés. Ce projet, pour la conception duquel les rouennais ont été consultés, prévoit également la création d’un parc central de près d’un hectare avec plus de 400 arbres. À une petite demi-heure de là, du côté de Louviers, 275 appartements Cogedim sortiront de terre d’ici 2027 pour renforcer l’offre de logements d’un territoire dynamique qui attire notamment de plus en plus de Franciliens.

Le regard de Stéphane Pons, directeur général délégué de Pitch Immo

« Nous accélérons aujourd’hui notre développement dans des zones où nous ne nous positionnions pas auparavant, avec l’objectif de créer des agences locales si nous remportons des marchés sur place. On sent vraiment ce frémissement pour les villes moyennes, où la qualité de vie peut monter d’un cran. Nous misons par ailleurs sur un savoir-faire qui, lui aussi, regarde vers l’avenir. Dans cette optique, Woodeum, dont l’excellence dans le domaine de la construction du bois n’est plus à prouver, est à nos côtés pour multiplier les projets porteurs en matière d’environnement ».

Le regard de Stéphane Pons, directeur général délégué de Pitch Immo

Mais alors que le marché du logement met en lumière leur potentiel, quelles sont les perspectives de l’immobilier d’entreprise en régions ? « Avec une connaissance aiguë du terreau local et un réseau d’investisseurs potentiels bien entretenus, l’immobilier d’entreprise a aussi son mot à dire", abonde Oubay Churbaji, directeur général grands comptes en immobilier d’entreprise chez Altarea. Confirmation sur le terrain, avec le récent lancement d’un immeuble « en blanc » acquis par EDF à Aix-en-Provence, ou encore #Community à Mérignac (33), le nouveau siège régional de Groupama, un bâtiment d’inspiration biophilique de 15 000 m2 inauguré le 15 avril dernier (33). De quoi faire grimper le nombre d’habitants lors du prochain recensement ?

Le regard d’Oubay Churbaji, directeur général grands comptes en immobilier d’entreprise chez Altarea

« La décentralisation et le développement massif du télétravail influent sur l’immobilier tertiaire, un marché qui résiste bien en région présente un fort potentiel de développement pour les années à venir. Ces tendances, même si elles se traduisent aujourd’hui par des mouvements de personnes plutôt que par des transferts d’entreprises, continueront à prendre de l’ampleur dans les métropoles régionales. Les atouts sur lesquels Altarea doit s’appuyer pour conserver son leadership sur le marché de l’immobilier d’entreprise en région : une équipe dédiée et agile, une connaissance des marchés et tissus locaux, et des synergies avec les autres métiers du Groupe ».

Le regard d’Oubay Churbaji, directeur général grands comptes en immobilier d’entreprise chez Altarea

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(1) Dans une définition mêlant emploi, population et statut administratif, l’INSEE définit comme ville moyenne « un pôle de moyenne ou grande aire urbaine comprenant plus de 5 000 emplois, dont la population est inférieure à 150 000 habitants et qui n’est pas une préfecture d’une ancienne région. 311 villes de France métropolitaine répondent à cette définition, selon l’Institut.

(2) « Les villes moyennes, un pilier durable de l’aménagement du territoire ? » – France Stratégie Note n°107, janvier 2022.

(3) L’étude IFOP pour l’Agence nationale de la cohésion du territoire, 2020.